Revue apicole 1981
L' ABEILLE
L ' abeille au vol léger répand son harmonie
A u fil du vent , partout , et surtout sur les fleurs .
B utineuse et ardente , ô lumière infinie !
E lle produit le miel et vit avec ses sœurs
I nsecte social , glaneuse de soleil ,
L ance un rayon d' Amour vers la voûte éthéré :
L ' apiculteur heureux ne néglige ton miel ,
E t dans son noble cœur il te veut préférée .
Urbain Christen
L' ABEILLE
Dis , l 'abeille , entre prolétaires
On peut se parler sans se gêner .
Alors , franchement , ça t' dérange pas
De savoir que tes chromosomes
Sont programmés par IBM
De subir ton destin
Au lieu de pouvoir le prendre en mains
D' être condamnée à perpète
A tourniquer comme une hélice .
Tout ça sans faire de bénéfice .
Dis l' abeille , tu trouves pas que c' est bête
Les règles du jeu de nos sociétés ?
Anonymes hyménoptères ou anonyme humanité
On s' entasse dans les hexagones
De nos HLM des bas quartiers .
On passe notre temps à s' emmieller
Pour que les autres viennent se sucre .
Dis l' abeille , tu en as pas marre
D' avoir que des dames au salon ?
De demeurer simple ouvrière
En ondulant de la tarière
En te laissant nourrir ces lardons .
Dis l' abeilles si on était moins cloche
Si depuis le coup de Napoléon
On n' en connaissant pas un rayon
Sur ce qui se passe sous les manteaux
Des milieux de politicards
Je crois qu' on ferait la révolution .
Dis l' abeille , t' as jamais le bourdon ?
Ca te fatigue pas de bouffer que des fleurs
Le nectar c' est comme le caviar
A la longue ça devient monotone .
T' as jamais envie de changer de menu
Ou comme moi , de te camphrer la ruche ?
Dis l' abeille , t' as pas la nausée ?
T' as pas la trompe qui te chatouille
Comme quand on mange trop de fenouil
A renifler tes acacias
Ton tilleul ou tes pétunias ?
Je parle pas des couleurs , ni du goût
Vu que le rouge tu le vois pas
Et que , pour ce qui est de la tartine
Dans le genre on ne fait pas mieux que toi .
Merci l' abeille de m' inviter
C' est joli mais c' est petit chez toi
Compte tenu de tous les locataires
C' est bien tenu , je te félicite !
C' est pratique tous ces rayons
Tiens c' est marrant , nous on cire par terre !
Évidemment c' est bien bruyant
T' arrêterait pas la ventilateur ?
Oh pardon ! Je vois que c' est tes sœurs
Dis , les pauvrettes , elle voient de l' air
Mais ça tient en condition
De conditionner toute la maison .
Pour le loyer comment ça marche ?
C' est à la hausse ! C' est comme chez nous !
On engraisse les propriétaire .
Dis donc c' est quoi , c' est de la fumée ?
Y faut jamais parler de loup
Ca le fait sortir de son trou .
C' est le patron de la bigrerie
Qui passe pour relever le compteur .
Butin d' Butin , c' est un beau salaud !
Y pique le miel de ces pauvres filles
Excuse-moi , mais j' peux pas voir ça
J' ai jamais aimé les gigolos
J' aime mieux me tirer , non trop c' est trop !
Tu te plains pas de ton boulot
Tu te maries pas , t' as pas de soucis
Tu prends ce qu' on te donne pour remplacer
Le meilleur qu' on devrait suivre ton exemple
Mais tu vois on a rien dans le pot
Nous faut qu' on râle , faut qu' on conteste
On est comme ça , parce que dans le noir
Y nous faut un rayon d' espoir .
M. Sch (19 ans )
HUBERT L' AVEUGLE
Vous qui passez par Pregny ,
Le long bruissement des essaims ,
Entrez dans le petit cimetière ,
Le vol lourd des bourdons ,
Un beau dimanche après-midi ,
De bonne heure le matin ,
C'est là qu'a reposé Hubert .
Comme un bruit de frelons .
Sur le mur de ta maison ,
A reconnaître sans peine ,
La Société genevoise d' apiculture
Des abeilles le rappel ,
A fait sceller un médaillon ,
De toutes leurs petites ailes ,
En ta mémoire aux génération futures ,
Et puis , le chant des reines ,
Le grand chercheur Hubert ,
A l' ouverture d' une ruche ,
Depuis deux fois cent ans ,
Tu respirais bien sûr ,
Repose sous six pieds de terre ,
Comme sortant d' une ruche ,
Plus rien n' est comme avant .
L' odeur du miel bien mûr .
Sans voir le temps qui fuit ,
Du propolis la forte odeur ,
Tu les sentais tes chères abeilles ,
Du nectar embaumé ,
Dans ton éternelle nuit ,
Parfum de mille fleurs ,
Avec ton esprit toujours en éveil .
Au riche pollen perlé .
De tes recherches fertiles ,
Mais quelle union magnifique ,
Des reines la solution
Pour que tant d' années après ,
Pour nous combien utile
Du grand maître et du domestique ,
Le mystère de la fécondation .
On en ressente encore les effets .
Pour ta grande satisfaction ,
Je désire que reste dans nos cœur ,
Ton oreille percevait ,
Du grand chercheur le souvenir ,
Dans la belle saison ,
Comme une immortelle fleur ,
De la nature les secrets .
Dans le présent et l' avenir .
Daniel Pécoud
Revue apicole 1980
Plus haut
Brun village accroché à l' Alpe ,
Qu' as-tu fait de tes faux ?
Soulevant l' herbe comme d' un scalp ,
Tapis haletant ainsi que des naseaux ,
L' abeille , encore une fois cherchait l' ivresse ,
Frôlant les corolles à peine fanées ,
Ne laissant rien l, éperdue de vitesse ,
Car là-haut , brèves sont les journées .
Maintenant , autour des chalets nouveaux ,
L' on entend le ronronnement des tondeuses ,
Les pelouse ratissées à fleur de peau
Naissent de plus en plus nombreuses ,
La plaine monte à l' assaut de l' alpage ,
Il n' y a plus de chèvres curieuses ,
Bondissant des talus , les étages ,
Furetant, gourmandes parmi les scabreuses .
Il faut grimper , toujours monter ,
Dans l' air , le matin sent la glace ,
L' on entend les clochettes tinter ,
Ici l' homme de bâtir n' a point d' audace ,
L' infini déploiement des fleurs odorantes ,
Offre sa rosées à l' astre d' or ,
Lui , majestueux , embrase les pentes ,
Plus hauts le rapace prend son essor .
Marie Guisolan
Revue apicole 1979
La fourmi et l' abeille
A jeun , le corps tout transi , Elle est riche et généreuse ,
Et pour cause , Elle plaindra mon malheur
Un jour d' hiver , la fourmi , Oui , tout mon espoir repose
Près d' une ruche bien close , Dans la bonté de son cœur
Rôdait pleine de souci . Je demande peu de chose ;
Une abeille vigilante Mais j' ai froid , j' ai faim , ma sœur !
L' aperçoit et se présente . Oh!Oh! répondit l' abeille ,
Que viens-tu chercher ici ? Vous discourez à merveille .
Lui dit-elle . Hélas ! ma chère , Mais vers la fin de l' été ,
Répond la pauvre fourmi , La cigale m' a conté
Ne soyez pas en colère : Que vous aviez rejeté
Le faisan , mon ennemi , Une demande pareille .
A détruit ma fourmilière : Quoi ! Vous avez ? Mon Dieu , oui!
Mon magasin es tari ; La cigale est mon amie ,
Tous mes parents ont périt Que feriez-vous , je vous prie ,
De faim, de froid , de misère , Si , comme vous aujourd’hui ,
J' allais succomber aussi J' étais insensible et fière ,
Quand , du palais que voici , Si j' allais vous inviter
L' aspect m' a donné courage A promener ou chanter ?
Je le savais bien garni Mais rassurez-vous , ma chère ,
De ce bon miel , votre entourage Entrez , manger à loisir ,
J' ai fait effort , j' ai fini Usez-en comme du vôtre ,
Par arriver sans dommage . Et surtout pour l' avenir ,
Oh ! me suis-je dit , ma sœur Apprenez à compatir
Et fille laborieuse , A la misère d' une autre .
Jussieu
Transmis par Daniel Pécoud .
Espérer
Espérer , espérer . Ce mince filet d' eau
Qui coule au flanc de la montagne , Humble ruisseau
Ou fleuve voyageur oublier de la source ,
N' a-t-il pas tout au long de sa chantante course
Le désir, l' espérance , hélas peut-être en vain ,
D' aller grossir les flots d' un océan lointain ?
Méditer , travailler , se demander : demain ,
Saurai-je utilement me rendre plus humain ?
Faire ce qui ne fut au cours de l' âge tendre ;
Le parfum est exquis des roses de novembre...
Puis il viendra le jour impossible à prévoir
Où nous apparaîtra l' immense abîme noir....
Lors tout sera fini , notre chair sera morte ,
Mais son souffle vivra dans le vent qui l' emporte.
relevé pas Doudin
Rester jeune
C' est vouloir que l' esprit conserve ses vingt ans ,
Même si les cheveux sont plus rares et blancs .
C' est sourire au matin comme un enfant qui chante ,
S' émerveiller des soirs . Si la lune est absente
La créer pour soi-même et d' un ciel étoilé .
Se nourrir de projets , d' illusions , de rêves ,
Oublier que les ans n' ont que des heures brèves ,
Car il en est du temps comme l' être aimé ,
Dont chaque instant grandit à nos yeux la beauté ;
Garder au cœur l' élan , l' amour , l' enthousiasme ;
L' âge affaiblit l' ardeur mais il enrichit l' âme .
relevé par Doudin
Printemps
Enfin , te voilà revenu !
A vrai dire m on n' y croyait plus .
Et pourtant après chaque hiver ,
Parsemé de jolies primevères ,
Tu repoussais les derniers frimas
Et l' hiver avec tous ses tracas .
Cette année , tu t' es fais attendre
Afin de mieux te faire comprendre .
Car l' homme à ce jour si blasé ,
Ne voit plus le temps passer .
Et c' est à tort , je le regrette ,¨
Que notre attention est si distraite .
Pour un instant , comme le poète
Ouvre grand tes yeux et tes oreilles .
Essaye un peu d' apprécier ,
ce qui pour nous a été créé .
Fais le pendant qu' il es encore temps
Et ta vie sera éternel printemps .
Pourtant après ce long sommeil ,
Dame Nature se réveille .
Tel un miracle fabuleux ,
Elle enchante qui le vent .
De la fleur à l' arbre centenaire ,
De l' animal à l' insecte éphémère .
Dans l' air le chant des oiseaux ,
Nous annonce le renouveau .
Le bruissement des abeilles ,
Est une de ces merveilles
Que l' apiculteur connaît bien ,
Si au rucher tout est sain .